Les services Google numériques, le cas Google My Business (GMB) : les conséquences sur l’e-reputation et la protection des données personnelles des professionnels

Google My Business, est, comme son nom l’indique, un service Google proposé aux professionnels. Ce service répertorie les professionnels notamment les propriétaires d’entreprises ou encore les professionnels exerçant en profession libérale, comme les professionnels de santé par exemple. C’est un annuaire professionnel en ligne, érigé par Google.

Le service a été lancé en 2014, et permet une plus grande clarté et un contrôle pour le professionnel de ce qui apparaît de lui dans les résultats de recherches sur le web. Le but est d’attirer davantage de clients et de permettre une plus grande visibilité notamment que ce soit à travers les coordonnées de l’entreprise ou les photos illustrant le domaine de prédilection du professionnel. Google My Business utilise de nombreux services Google également comme Maps ou encore Streetview.

Toutefois, l’inconvénient majeur de Google My Business, pour certains, est le fait de pouvoir déposer un avis du professionnel en ligne. L’avis sera alors presque indélébile et apparaîtra sur sa page lorsque son nom sera tapé dans le moteur de recherche.

Cela peut être très positif, tout comme très négatif. Si l’avis est mauvais cela entache la e-reputation du professionnel, réputation essentielle de nos jours. Une mauvaise publicité et toute une activité peut être remise en question. Toutefois, Google a, par principe, selon la loi du 21 juin 2004, loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN), l’obligation d’identifier les auteurs de ces avis clients.

Un problème pour le traitement des données personnelles

Si l’on en croit l’actualité, de plus en plus de professionnels ont des problèmes liés à leur page Google My Business. Tout d’abord si la page n’a pas été initiée par leurs soins. En effet, la page peut être créée à la demande du professionnel ou créée par Google simplement, et ce parfois sans l’avis et surtout sans le consentement du professionnel. Cela ajoute alors un problème concernant les données personnelles du professionnel. Ses données personnelles sont alors exploitées par Google, il y a donc nécessité du consentement.

En premier lieu, une ordonnance de référé du Tribunal de Grande Instance de Paris, le 6 avril 2018, avait condamné Google. En effet, Google My Business avait été alors contraint de supprimer une fiche qui avait été publiée sans le consentement du professionnel. Cette fiche contenait notamment des avis négatifs sur les pratiques médicales de ce professionnel de santé.

La décision avait été tranchée notamment en s’appuyant sur la Loi nº 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’Informatique et aux Libertés et sur l’article 226-18 du Code Pénal qui précise que « Le fait de collecter des données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende ». Le Tribunal de Grande Instance de Paris avait donc donné raison au professionnel, condamnant Google.

Google avait donc été contraint de supprimer la fiche car il était illégal de procéder au traitement de ces données sans le consentement de la personne intéressée. Le professionnel était encore alors libre de son choix et de l’usage de son identité numérique.

Un autre problème majeur : l’impact de ce service sur l’e-reputation du professionnel

Actuellement, un autre problème apparaît avec l’existence de Google My Business : l’e-reputation. Les entreprises appréhendent énormément leur e-reputation, pouvant nuire à leur notoriété. Cela peut autant concerner une multinationale qu’une profession libérale. Une mauvaise publicité peut avoir de grandes répercussions sur les affaires d’une entreprise.

Un avis posté sur une page Google My Business peut être celui d’un client réel. Mais il peut également être celui d’une personne malveillante n’ayant jamais visité le lieu. Il n’y a pas de vérification. A l’heure actuelle, l’e-reputation est si importante pour le professionnel qu’elle peut détruire une carrière. L’existence de Google MyBusiness peut donc être particulièrement néfaste pour la poursuite de l’activité d’un professionnel si l’interface n’est pas utilisée par des clients sincères.

On a eu une ordonnance de référé récemment qui a permis d’éclaircir le sujet Google My Business. C’est l’ordonnance de référé du Tribunal de Grande Instance de Paris en date du 11 juillet 2019. Dans ce cas-là, une professionnelle de santé avait demandé à Google de supprimer certains commentaires considérés comme insultants à son égard et Google avait alors refusé.

Le Tribunal de Grande Instance de Paris a également refusé la suppression de la fiche au motif de la liberté d’expression. En effet, pour le Tribunal de Grande Instance de Paris, malgré les commentaires considérés comme diffamants pour la professionnelle, le trouble n’était pas manifestement illicite. La demande de la requérante avait été alors refusée.

On a une autre ordonnance de référé en date du 16 juillet 2019, rendue par le Tribunal de Grande Instance de Metz. Cela concernait encore un professionnel de santé qui disposait d’avis négatifs sur son interface Google My Business. La décision a été la même que celle du Tribunal de Grande Instance de Paris. Google n’a alors pas été contraint de supprimer cette autre fiche. Dans cette affaire, le requérant avait évoqué notamment les propos injurieux portés à son égard mais le trouble manifestement illicite n’a également pas été caractérisé.

Ces deux ordonnances ont montré que Google n’était donc pas forcé de retirer la fiche d’un professionnel de santé comportant des avis négatifs sur ses pratiques médicales.

Google MyBusiness, l’existence d’une remise en question du droit à l’effacement

Le droit à l’effacement (ou droit à « l’oubli numérique ») est défini à l’article 17 du Règlement sur la Protection des Données (RGPD). En effet il est précisé que « la personne concernée a le droit d’obtenir du responsable de traitement l’effacement, dans les meilleurs délais, de données à caractère personnel la concernant et le responsable de traitement a l’obligation d’effacer ces données à caractère personnel dans les meilleurs délais ». 

Dans ces affaires actuelles, en référence à la liberté d’expression, le professionnel n’a plus le libre choix quant à ses données et à leur publication. En effet, par principe, toute personne peut s’opposer au traitement de ses données personnelles, notamment en ce qui concerne la prospection commerciale. Le Tribunal de Grande Instance de Paris et le Tribunal de Grande Instance de Metz, en donnant raison à Google dans ces affaires, remettent en cause ce droit.

Cela remet en cause le principe du droit d’opposition, considéré comme essentiel. En effet, Google My Business est un service récent. Il appartient donc aux tribunaux de réfléchir et se mettre d’accord sur quelle position adopter dans le futur, où d’autres litiges de même substance pourront naître. En l’espèce, il est pour l’instant question de privilégier la liberté d’expression, au détriment de la protection des données personnelles et de l’e-reputation des professionnels.

 

 

Sources:

Loi nº 78-17 du 6 janvier 1978« relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés »

Loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN)

Revue Lamy Droit de l’Immatériel, nº 148, 1er mai 2018

Règlement général sur la protection des données (RGPD), 25 mai 2018

Revue Communication Commerce électronique n° 7-8, Juillet 2019

Code Pénal 2020, Éditions Dalloz

Site internet Google My Business

Site internet Legalis